Les Vikings, Du Golfe de Gascogne à la Méditerranée, 2025, 464 pages

1 – C'est le premier ouvrage à étudier l'action des Vikings dans la moitié sud de l'Europe.

2 – Par voie de conséquence, c'est le premier ouvrage à étudier le phénomène viking dans son entièreté.

3 – Cet ouvrage analyse le phénomène viking comme une guerre.

4 – Cette guerre a été menée par un clan bien connu -associé à la royauté danoise-, celui de Ragnar.

5 – Ce clan n'était pas installé en Scandinavie ni dans les îles britanniques, mais en Aquitaine.

5 – Ce clan appliquait une stratégie dont l'objet n'était pas la conquête des îles britanniques, mais l'accès au commerce méditerranéen.

6 – Plus que Charlemagne et Mahomet, le phénomène viking est à l'origine de la révolution maritime européenne, des croisades et des Grandes Découvertes.

7 – Le phénomène viking est né d'une réaction à l'impérialisme romain qui entendait uniformiser le monde.

8 – Le monde scandinave va essaimer sa culture communautaire et parlementaire à travers l'Europe.

1 – C'est le premier ouvrage à étudier l'action des Vikings dans la moitié sud de l'Europe.

En 2015, Ann Christys a publié un ouvrage intitulé "Vikings in the South", mais l'historienne britannique avait choisi de faire commencer le sud aux Pyrénées. Or, celui-ci commence en réalité à la Loire et on ne peut fait abstraction de l'Aquitaine, de la Septimanie et de la Provence lorsqu'on étudie les Vikings dans le sud de l'Europe. La guerre opposant Pépin II d'Aquitaine à Charles le Chauve dura un quart de siècle. Dans cette guerre, les hommes du Nord prirent fait et cause pour Pépin. Avant même d'envahir l'Angleterre en 867, les Vikings avaient pris toutes les cités d'Aquitaine...

2 – Par voie de conséquence, c'est le premier ouvrage à étudier le phénomène viking dans son entièreté.

Tous les ouvrages se présentant comme une synthèse sur la période viking liquident en général la moitié sud de l'Europe en quelques lignes, comme si les Vikings n'avaient jamais traversé la Loire. Cette lecture est née en 1911 lorsque les historiens de Normandie ont décidé que seuls les fondateurs de la Normandie, les "Danois actifs au nord de la Loire" étaient dignes d'intérêt. Au sud de la Loire, seuls de vulgaires pirates norvégiens auraient ravagé le pays. Or, les sources franques sont formelles : ce sont les mêmes chefs qui commandent au Nord et au sud de la Loire...

3 – Cet ouvrage analyse le phénomène viking comme une guerre commerciale.

Entre 834 et 845, durant la première décennie des invasions, les hommes du Nord prennent tous les ports de la façade atlantique. Dorestad en 834, Anvers et Witla en 835, Bayonne et Bordeaux en 840, Rouen en 841, Londres et Quentovic en 842, Nantes en 843, Lisbonne et Séville en 844, Paris, Saintes et Hambourg en 845. Ils ne se comportent pas en pillards de monastères, mais lancent un défi militaire et commercial qui menace la stabilité économique des plus grandes puissances d'Occident. Cette guerre va durer un siècle et demi.

4 – Cette guerre a été menée par un clan bien connu, celui de Ragnar.

La généalogie des chefs vikings est systématiquement ignorée par les historiens français. Admettre qu'ils appartiennent à un même clan les obligerait à réviser l'image d'Epinal du pillard sans stratégie. Ce clan apparaît pourtant clairement dans les sources scandinave. Le roi danois Harald Hildetand est l'oncle Sigurd Ring, qui lui succédera. Sigurd est le père de Ragnar Lodbrok, lui-même père de Björn Ragnarsson. Les sources franques et gasconnes poursuivent cette généalogie faisant de Kaetill le fils de Björn Ragnarsson et le père d'un certain Rollon. Dans cette généalogie, Rollon ne serait pas le frère de Ragnar comme dans la série, mais son arrière-petit-fils. Cette appartenance au clan explique comment Rollon a réussi à s'imposer à la tête des Vikings d'Occident et à négocier avec le roi de France.

5 – Ce clan n'était pas installé en Scandinavie ni dans les îles britanniques, mais en Aquitaine.

La toponymie est le premier révélateur de cette présence scandinave : Bayonne et Béarn (Björn), Hossegor et Aigre (Asgeir), Royan et Reigner (Ragnar), Hostens et Esténos (Hastein), Yvrac et Inguère (Ingvarr). Les sources normandes et franques confirment qu'Asgeir, Björn et Hastein combattirent en Gascogne à une époque où, selon les sources gasconnes, il y eut des combats dans la région... Le passage des hommes du Nord expliquerait beaucoup d'anomalies gasconnes : chasse à la baleine, droit de Varech, cadets de Gascogne, assemblées, savoir-faire maritime, usage du clin, charpenterie nordique, toponymie scandinave, anthroponymie etc...

6 – Ce clan appliquait une stratégie dont l'objet n'était pas la conquête des îles britanniques, mais l'accès au commerce méditerranéen.

Depuis plus d'un siècle, les Britanniques expliquent que les îles britanniques seraient l'alpha et l'oméga des invasions. Pourtant, alors que les attaques débutent en 834, il faut attendre trois décennies avant de voir les hommes du Nord s'intéresser aux îles britanniques. Avant cela, ils ont pris le temps de rejoindre Contantinople et Alexandrie, de vaincre Charles le Chauve et de conquérir l'Aquitaine. Mais aux yeux de l'historiographie britannique, tout ce qui se passe hors d'Angleterre est secondaire. Ce ne serait que des actes préparatoires à l'invasion de l'Angleterre... Il est temps de réviser cette lecture britannico-centrée.

7 – Plus que Charlemagne et Mahomet, le phénomène viking est à l'origine de la révolution maritime européenne, des Croisades et des Grandes Découvertes.

La Méditerranée était depuis toujours l'épicentre du monde occidental. L'Egypte, la Phénicie, la Grèce, Rome, Carthage, l'Islam, tout se passait en Méditerranée. Mais au Moyen âge, on assiste à un glissement du monde vers la façade atlantique où de nouvelles puissances : Portugal, Espagne, France, Angletere, Provinces-Unis vont prendre en main la destinée du monde. Ce basculement n'a pas eu lieu par l'Espgane, la Bretagne ou la Normandie, mais par l'Aquitaine, celle d'Aliénor. Ce glissement n'est pas imputable à Charlemagne ni à l'Islam, mais à la venue d'hommes qui ont réappris aux Européens -et notamment aux Gascons- l'art de la navigation et leur ont donné le goût des grandes découvertes.

8 – Le phénomène viking est une réaction au totalitarisme romain qui entendait uniformiser le monde.

Le phénomène viking est né d'une révolte. Charlemagne, bras séculier de Rome, voulait convertir le monde et l'uniformiser sous la règle romaine. Le clan installé en Gascogne, enrichi par le commerce méditerranéen, et disposant sur la côte de la plus vaste forêt de chênes d'Europe, va estimer que la guerre contre les Francs est inévitable. Il va donc décider de la préparer et à cette fin, il va organiser en Gascogne de vastes chantiers navals capables de construire jusqu'à cinquante unités par an. En 50 ans, ils produiront 2500 navires. Maître de cette flotte, le clan va attirer à lui tous les jeunes européens souhaitant une vie meilleure, pleine d'aventures et de richesses. Des Scandinaves rejoindront massivement le clan, mais aussi des Bretons, des Aquitains, des Provençaux, des Asturiens et des Saxons qui verront là l'opportunité de combattre l'oppresseur franc.

9 – Le monde scandinave va essaimer sa culture communautaire et parlementaire à travers l'Europe.

Dans le monde scandinave, l'intérêt individuel s'efface derrière celui de la communauté. Les décisions sont prises en assemblée et le chef peut être démis à tout instant sur un simple vote. Cette conception communautaire du pouvoir, s'oppose résolument à l'hiérarchie romaine. Les hommes du Nord répandront leurs coutumes sur les rivages atlantiques qui resteront toujours hostiles à l'impérialisme romain. Il n'est pas anodin de constater que le protestantisme triomphera dans le Nord et... en Aquitaine. Les Aquitains étaient anti-romains comme ils étaient anti-français. La guerre de Cent Ans n'était pas une guerre contre l'Anglais comme l'a présenté le Roman national parisien, c'était une guerre d'annexion de l'Aquitaine par le royaume de France.

Né en Armagnac d'une mère scandinave, Joël Supéry étudie depuis près deux décennies le passage des hommes du Nord dans la sud de la France.

En 2003, il s'installe en famille à Capbreton. Il demande à l'érudit qui lui fait visiter la maison l'origine de ce nom absurde sur une côte sans cap ni Breton. L'homme est bien en peine de lui répondre. A la société historique locale, il découvre que les descendants des chasseurs de baleine, étaient décrits en 1900 comme des blonds aux yeux bleus, "restes dégénérés de Wisigoths". Or, ces hommes pratiquaient la chasse avec un harpon, comme les Scandinaves. Ces chasseurs de baleines auraient-ils pu être des descendants de Scandinaves ? La question tombait sous le sens, mais n'avait jamais été posée... En reprenant les sources gasconnes, l'auteur découvre que soixante-dix ans avant la fondation de la Normandie, les hommes du Nord avaient jeté leur dévolu sur la Gascogne. En cherchant à comprendre leur motivation, il en est venu à questionner l'histoire des invasions vikings en Occident. Sa lecture qui prend le contrepied de la lecture académique lui vaut de violentes critiques, mais il poursuit son chemin avec une constat rassurant : s'il faisait fausse route, il ne devrait pas trouver autant d'éléments convergeants vers une présence scandinave durable dans la région.

Il a publié "Le Secret des Vikings", les Equateurs, 2005, Les Vikings au coeur de nos Régions, Yago, 2009, La Saga des Vikings, une autre histoire des invasions, Autrement, 2018.

En 1999, Joël Supéry s'est fait connaître en lançant l'Aérolune, un ballon captif embarquant 30 passagers à 150 mètres d'altitude au-dessus du port de la Lune à Bordeaux. Son idée était déjà de faire prendre conscience aux Bordelais que leur véritable identité ne se trouvait pas dans le vin, mais dans le port. Le ballon embarqua ainsi 25 000 passagers avant que l'ouragan Martin ne vienne détruire les installations le 27 décembre 1999.